Humeur du soir sur Skye

Je me sens un peu seule ce soir. J’ai un dépôt de tristesse qui encrasse le fond de mon corps. J’ai le dos las, la tête lourde, les pieds mouillés et les lèvres brulantes de soleil. La nuit commence tout juste à tomber, quelques bouts de nuages roses restent éparpillés dans le ciel. Par dessus le bruit du chauffage qui tente de sécher mes chaussures, j’ai le ressac, la houle et le vent qui accompagnent parfaitement ma solitude. Un écho naturel à ma mélancolie. La nuit promet d’être une fois encore agitée.
Le vent fait tanguer la voiture, avec brusquerie, comme pour me rappeler qu’au fond je ne suis pas si seule.
Je me demande sans cesse si je vais enfin réussir à faire de bonnes photos. Pour l’instant j’en compte une, peut-être deux, celles qui datent du premier jour. Alors un sentiment de gaspillage m’envahit. Pourquoi je suis ici, si je ne suis pas capable de faire correctement mon travail ? Je suis tiraillée entre faire une bonne photo, suivre plus ou moins mon planing et mon itinéraire et essayer de ne pas m’épuiser à trop conduire. Je passe beaucoup trop de temps à me demander si je n’ai pas raté une opportunité, si je n’aurais pas dû faire demi tour pour faire un portrait de ce mouton, de ce bateau, de ce nuage, de ce brin d’herbe… si je n’aurais pas dû arriver plus tôt, plus tard, demain, hier pour avoir une bonne lumière, si je n’aurais pas dû attendre pour avoir un coucher de soleil sur cette montagne ? Oui mais alors, je rate cet autre point de vue ? Voilà en gros à quoi je passe mes journées…
Tout en essayant de ne pas foutre en l’air la voiture, dans une ornière, contre un mouton, contre un camion… j’en aurai pour trop cher de caution.

J’exagère, je passe en fait une bonne partie de mon temps à m’extasier sur le dehors. Un paysage nappé de vert et de brun qui prend des reflets orangés sous la lumière d’hiver. Un paysage parsemé de moutons, de chèvres et de lochs bleu gris qui s’agitent sous un vent insatiable. Un paysage aux mille vallées, aux routes sinueuses, aux arbres décharnés et aux étranges parfums de fantômes.

J’aime me noyer parmi cette nature brutale et sauvage. J’aime conduire sur ces routes étroites et sans fin. J’aime y arriver seule, ça me fait me sentir plus forte, vivante, grandie…

Voilà je savais qu’écrire ce que j’ai au fond de mon crane m’aiderait à chasser la triste solitude qui plane ce soir. Par contre je crois que j’ai cassé le chauffage de la voiture…

 

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2017-02-19T15:45:25+00:00 février 15th, 2017|6 Comments

6 Comments

  1. Suse 16 février 2017 at 13 h 15 min - Reply

    C’est un très beau texte bien qu’il est mélancolique. Tu vas réussir!

  2. Mary 16 février 2017 at 14 h 16 min - Reply

    <3

  3. Cha 17 février 2017 at 7 h 46 min - Reply

    Moi je les trouve toutes réussies tes photos!!

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